Sécurisation du Kbis

Une information fiable et certifiée pour entreprendre en confiance

Interview de Didier OUDENOT – Greffier associé du tribunal de commerce de Marseille, Président honoraire du CNGTC

Administrateur du G.I.E. des greffiers Infogreffe, il est également président du Groupement d’intérêt public du Portail de la Publicité Légale des Entreprises (PPLE).

En octobre 2022, Il est nommé délégué national à la lutte contre la fraude du CNGTC.

Le greffier de tribunal de commerce 

Le greffier de tribunal de commerce est un professionnel libéral, officier public et ministériel. Il est nommé par le garde des sceaux, ministre de la justice. A la croisée des mondes judiciaire et économique, il assure par délégation de l’Etat des missions de service public au profit de la justice commerciale et des entreprises.

Le greffier est ainsi chargé de la tenue du registre du commerce et des sociétés (RCS) et des autres registres d’information légale qui constituent l’outil essentiel de contrôle et de transparence de la vie économique. Il assure la tenue du registre des bénéficiaires effectifs depuis 2017. Le greffier de tribunal de commerce est assujetti aux obligations de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme en application du 19° de l’article L. 561-2 du code monétaire et financier.

FraudNews : Peut-on comparer le Kbis d’une entreprise au titre d’identité d’un particulier ?

C’est effectivement très comparable, l’officier d’état civil de votre mairie réceptionne, contrôle les déclarations et établit des actes d’état civil : déclaration de naissance, de décès. Il établit les dossiers de mariage et délivre les livrets de famille. Il prend acte et enregistre les décès.

Le greffier est aussi un officier public, nommé par le garde des sceaux. En cette qualité, il est délégataire de la puissance publique de l’État et, au nom de ce dernier, ils confèrent l’authenticité aux actes de sa compétence. Le greffier n’est pas un agent passif dans la tenue du registre. Il exerce un contrôle des déclarations effectuées tant au regard des pièces et actes déposés qu’au regard de certaines règles propres à certaines personnes soumises à l’immatriculation.

Le greffier s’assure, sous sa responsabilité, de la régularité de la demande qui lui est soumise. C’est à compter de son immatriculation au RCS que le commerçant est officiellement réputé agir comme tel et qu’une société jouit de la personnalité morale (art. 1842 du code civil et L. 210-6 du code de commerce). Les effets juridiques de ces immatriculations sont donc très importants, tant pour l’entreprise que pour ses clients et fournisseurs qui ont besoin d’évoluer dans un environnement sécurisé. Tout comme l’officier d’état civil de la mairie, le greffier, « officier d’état-civil des entreprises », tient à jour les registres et délivre des actes sous sa responsabilité en étant garant de leur authenticité.

FraudNews : Quelles vérifications sont réalisées en amont de la création de l’entreprise et donc du Kbis ?

Les greffiers contribuent au quotidien à la transparence de la vie économique et à son corolaire la sécurité juridique des actes qu’il délivre.

Cela implique en amont un contrôle général de légalité, auquel s’associe un contrôle de police économique.

  • Un contrôle de légalité

Le greffier sous sa responsabilité s’assure de la régularité de la demande ». Si elle ne remplit pas les conditions légales et réglementaires, le greffier doit rejeter la formalité.

Il y a en réalité plusieurs types de contrôles effectués par le greffier :

  • Le contrôle de compétence pour recevoir les déclarations des entrepreneurs. 
  • Le contrôle de conformité des énonciations aux dispositions législatives et réglementaires : il s’agit de vérifier si toutes les mentions requises par les différents textes applicables sont bien déclarées. Une vérification de cohérence de l’ensemble des énonciations est également effectuée.
  • Le contrôle général de régularité : il s’agit de vérifier si les mentions portées dans les déclarations sont conformes aux actes déposés et aux pièces justificatives.
  • Le contrôle de légalité spécifique aux sociétés : Le greffier vérifie que les statuts des sociétés ne comportent pas de cause de nullité et que les conditions de validité sont remplies.
  • Le contrôle de compatibilité de la déclaration avec l’état du dossier : il consiste à vérifier si une formalité antérieure omise ou mal accomplie nécessite une régularisation avant de traiter la nouvelle déclaration.
  • Un contrôle de police économique

Le principe est exprimé clairement dans l’article L. 123-2 du code de commerce qui prévoit que « nul ne peut être immatriculé au RCS s’il ne justifie des conditions nécessaires à son activité ». A l’occasion de ces différents contrôles, le greffier effectue plusieurs vérifications essentielles sur les documents qui lui sont fournis :

  • la capacité commerciale du dirigeant, en interrogeant le casier judiciaire et le fichier national des interdits de gérer.
  • la cohérence et la validité des différentes pièces d’identité fournies (acte de naissance, carte d’identité, titre de séjour…).
  • la localisation des sièges sociaux (présence d’un bail, d’un document justifiant d’une adresse personnelle, d’une domiciliation collective).
  • Lorsque l’exercice de l’activité est subordonné à la détention préalable d’un diplôme, d’une autorisation ou d’un agrément administratif, le greffier vérifie la présence de ces documents et le cas échéant, échange avec l’entité concernée les informations requises par les textes.
  • Plusieurs autres éléments de la formalité sont par ailleurs vérifiés : actes de vente, contrats de location-gérance, publicités légales…

En sus de ces vérifications, tout au long de la vie de l’entreprise, un contrôle de permanence et de cohérence des informations détenues dans les différents registres est également mis en œuvre par le greffier.

Ainsi, par exception au principe déclaratif et dans l’intérêt d’une bonne information des tiers, le greffier est tenu de mentionner d’office au RCS les modifications intervenant suite aux décisions relatives aux procédures collectives et aux sanctions professionnelles et patrimoniales qui en découlent.

Le greffier effectue également d’office, à la demande des autorités publiques, différentes mentions sur le registre et, le cas échéant, des radiations d’office.

Kbis

Dans le cadre de sa mission de sécurisation et dans un contexte d’essor du numérique et d’augmentation de la fraude documentaire, les greffiers et leurs collaborateurs ont été formés à la détection des faux documents identitaires par des spécialistes du Bureau de la Fraude Documentaire de la Direction Centrale de la Police aux Frontières.

Ils ont également souhaité consolider leur capacité à lutter contre la fraude documentaire et les usurpations d’identité, qui permettent de fausses immatriculations au RCS et sont ensuite le socle des tentatives de fraude fiscale et de blanchiment de capitaux.

Pour renforcer le processus de vérification de la validité des cartes d’identité, passeports et titres de séjour des dirigeants d’entreprise transmis dans le cadre des formalités accomplies par les entreprises, les greffes s’appuient désormais sur les bases de données du ministère de l’Intérieur, et plus particulièrement le dispositif DOCVERIF.

L’utilisation de ce dispositif, est encadrée par l’article R. 123-95-1 du Code de commerce.

Dans ce même objectif d’efficacité les greffes se dotent ainsi d’un nouvel outil permettant de vérifier l’authenticité et l’exactitude des informations contenues dans les justificatifs de domiciliation d’entreprises (attestations de contrat de téléphone, facture de gaz, d’électricité, d’eau…) produits lors de l’accomplissement de formalités.

En intégrant la blockchain Archipels, les greffes accèdent désormais à un fichier de documents certifiés, répertoriant l’empreinte numérique cryptographique de chaque justificatif établi par son émetteur. Instantanément, le greffier sera en mesure dedétecter si les justificatifs de domiciliation déposés par les déclarants sont modifiés ou falsifiés. Le contrôle de la domiciliation des entreprises est ainsi renforcé, tout comme la validité des titres d’identité émis par les autorités françaises.

L’ensemble de ces mesures étend la capacité de contrôle et de certification des greffiers avec deux objectifs : celui de resserrer au maximum les maillons de la chaîne de lutte contre la criminalité financière et celui de permettre aux entreprises françaises d’accéder à une information fiable et certifiée pour entreprendre en confiance.

FraudNews : Comment contrôler l’authenticité du Kbis ?

Vous avez raison, une information contrôlée, enregistrée, authentifiée et certifiée est devenue primordiale pour les entreprises et les particuliers dans un environnement de fake news, de faux site, de fausses entreprises, de manipulation de la donnée, d’open data où tout et n’importe quoi devient accessible en masse.

C’est pourquoi, si le contrôle en amont des informations par le greffier est indispensable à la sécurité juridique, la délivrance par le greffier, officier public, des actes et notamment du Kbis doit être assortie de la confiance nécessaire que l’utilisateur doit avoir dans le document qu’on lui présente.

Un code Datamatrix est inséré dans le Kbis afin de vérifier l’authenticité du document, il permet de lutter efficacement contre la fraude documentaire en se connectant sur la fiche d’identité de l’entreprise. Voir la vidéo en fin d’article.


Une interface est mise à disposition de l’utilisateur pour le contrôle : https://www.infogreffe.fr/controle

Infogreffe logo

Elle permet de renseigner le code de vérification présent sur le KBis et affiche ensuite le Kbis tel que commandé. L’usager peut ensuite comparer visuellement par rapport au Kbis qu’il a en sa possession. Chaque code de vérification est unique puisque le Kbis peut potentiellement évoluer tous les jours.

Ce document est par ailleurs, toujours numéroté et horodaté en bas de page et le sceau et la signature du greffier en font un document officiel authentique qui produit des effets de droit. Son contenu est alors opposable aux tiers.

FraudNews : Un grand nombre d’entreprises sont soumis au code monétaire et financier et doivent se conformer au KYC. Pensez-vous que le processus de mise à jour du Kbis puisse réponde, au moins partiellement, aux obligations de remédiation des entreprises ?

Nous disposons d’un service dédié, le KYC Infogreffe https://kyc.infogreffe.fr.

Ce service permet de vérifier l’ensemble des données certifiées sur chacun de vos clients, prospects et partenaires, afin de répondre aux obligations de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (LCB-FT).

Il s’agit d’un outil de surveillance dédié à la connaissance du client basé sur les documents officiels et certifiés par les greffiers des tribunaux de commerce, en temps réel. Le service prévoit que toutes les différentes versions du Kbis soient historisées afin de permettre d’avoir un historique des mises à jour du Kbis pour une parfaite connaissance client.

Il se destine aux professionnels financiers et non financiers assujettis aux exigences en matière de LCB-FT (articles L561 et suivants du code monétaire et financier).

Ce service à valeur ajoutée permet de ;

  • Remplir ses obligations en matière de LCB-FT en vous appuyant sur une technologie innovante combinée à l’expertise métier des greffiers des tribunaux de commerce.
  • Réduire ses risques et documenter vos décisions en s’appuyant sur des informations fiables et certifiées, actualisées quotidiennement.
  • Simplifie ses process KYC grâce à un portail en ligne, avec des données également accessibles par échange de fichiers (API).
  • Surveiller l’ensemble des données certifiées sur chacun de ses clients, prospect et partenaires afin de réduire les risques d’usurpation d’identité, de blanchiment d’argent, de fraude et de financement du terrorisme.
  • Conserver des données au moins 5 ans après la fin de la relation client.

Laisser un commentaire